Pourquoi, dans la société actuelle, l’individu tend-il à perdre, à oublier, le sens de sa responsabilité pour entrer dans un état de soumission ? La situation de crises mondiales multiples provoquées par des erreurs aux racines lointaines est inquiétante. A des degrés divers, nous y participons tous et sommes complices de l’état de notre planète. Toute erreur commence dans la pensée. Sommes- nous conscients que nous vivons dans l’idéologie d’un progrès indéfini et sans respect pour les personnes et l’environnement ? Les crises actuelles montrent combien elles sont liées aux violences des différents pouvoirs : financiers, économiques, technologiques, militaires, religieux... Prendre conscience que, même dans un état démocratique, nous vivons trop souvent, avec notre consentement ou à notre insu, dans une situation de soumission, nous paraît important pour trouver une issue non-violente constructive à cet état de fait.
C’est donc à nous tous qui constituons la société civile qu’il revient de montrer qu’une issue nouvelle est possible pour éviter que se multiplient les atteintes à l’environnement, les injustices et les souffrances que la société libérale va continuer d’engendrer dans son expansion ou dans sa chute. Le culte de la performance dans lequel nous vivons pousse à la radicalité et peut conduire à la violence, y compris pour changer le monde. L’expérience de Milgram ou la tuerie de Norvège montrent que par raison et logique l’Homme peut devenir irresponsable et dangereux. La question se pose : où commence la soumission dont la pointe extrême est le crime d’obéissance ? Où, quand, comment est-il nécessaire d’entrer dans une insoumission éthique et une désobéissance organisée et constructive ? Est-il irresponsable dans certaines situations de désobéir à la loi ? N’est-il pas plus grave de ne rien dire, de ne rien faire quand le bien commun et la paix sociale sont en danger ?
"Pour faire le mal, il n’est pas nécessaire d’être méchant, il suffit de ne rien faire." Hannah Arendt
Vendredi 13 juillet après-midi
Conférence-débat "Obéissance et soumission", avec Frédéric Rognon
On sait, depuis le Discours de la servitude volontaire (1576) d’Etienne de la Boétie, que l’homme est un animal obéissant, qui préfère trop souvent la soumission à la liberté. Les expériences menées par Stanley Milgram dans les années cinquante (Soumission à l’autorité, 1974), ainsi que les études de Jacques Ellul sur la propagande (Propagandes, 1962), sans parler d’un certain nombre d’œuvres littéraires et cinématographiques (1984 de George Orwell, 1949 ; I... comme Icare, d’Henri Verneuil, 1979), ont poursuivi et affiné l’analyse de cette propension humaine à se soumettre. En nous appuyant sur leurs acquis, nous déclinerons les diverses dimensions du conditionnement : psychologique, éducative, institutionnelle, culturelle, religieuse... Car c’est en comprenant mieux les ressorts subtils de l’intériorisation de l’injonction, que nous pouvons les déconstruire pour envisager de nous en émanciper.
Ami de l’Arche, j’ai vécu à la Communauté de Bonnecombe de 1989 à 1995, j’ai été pasteur de l’Eglise Réformée de France, et j’enseigne la philosophie à la Faculté de théologie protestante de l’Université de Strasbourg. Accessoirement, je préside la Commission des professionnels de la justice et des aumôniers de prison de la Fédération protestante de France. J’ai écrit une dizaine d’ouvrages, dont : Gérer les conflits dans l’Eglise (Olivétan, 2006), Jacques Ellul. Une pensée en dialogue (Labor et Fides, 2007), et Dietrich Bonhoeffer. Un modèle de foi chrétienne incarnée (Olivétan, 2011).
Samedi 14 juillet après-midi
Conférence-débat "Eloge de la désobéissance civile", avec Jean-Marie Muller
Nos sociétés sont dominées par une culture de l’obéissance. Dès l’enfance, le petit d’homme est « formaté » pour obéir. Selon la théorie de l’État qui a prévalu jusqu’à présent dans nos sociétés, l’obéissance des citoyens à la loi de la majorité est l’un des fondements essentiels de la démocratie. Certes, toute vie en société implique l’existence de lois. Il serait donc vain, au nom d’un idéal de non-violence absolue, de concevoir une société où la justice et l’ordre pourraient être assurés par le libre concours de chacun, sans qu’il soit besoin de recourir aux interdits et aux obligations imposés par la loi.
Pour autant que la loi remplisse sa fonction au service de la justice, elle mérite le respect et l’obéissance des citoyens. Lorsque la loi cautionne ou engendre elle-même l’injustice, elle mérite le mépris et la désobéissance des citoyens pour le bien. La légalité des dispositions prises par l’État ne suffit pas à fonder leur légitimité. L’obéissance à la loi ne dégage pas le citoyen de sa responsabilité. La démocratie exige des citoyens responsables et non pas des individus disciplinés. Ainsi, celui qui se soumet à une loi injuste porte une part de la responsabilité de cette injustice. Ce qui fait l’injustice, ce n’est pas tant la loi injuste que l’obéissance à la loi injuste. Dès lors, pour dénoncer et combattre l’injustice engendrée par la violation du droit, pour lutter contre l’injustice de la loi, il est nécessaire de désobéir à la loi. Le "désobéisseur" est un dissident, il n’est pas un délinquant. Il ne se désolidarise pas de la collectivité politique à laquelle il appartient : il ne refuse pas d’être solidaire, il refuse d’être complice.
L’histoire nous apprend que la démocratie est beaucoup plus souvent menacée par l’obéissance aveugle des citoyens que par leur désobéissance. En réalité, l’obéissance passive des citoyens fait la force des régimes arbitraires et totalitaires ; dès lors, leur désobéissance peut être le fondement de la résistance à ces mêmes régimes. La désobéissance civile apparaît nécessaire à la respiration de la démocratie. Loin d’affaiblir la démocratie, elle la protège et la renforce.
Ecrivain et philosophe, Jean-Marie Muller est porte parole national du Mouvement pour une Alternative Non-violente. (MAN). Il a publié de nombreux livres qui sont reconnus comme des ouvrages de référence sur la non-violence, notamment le Dictionnaire de la non-violence (Le Relié Poche), L’impératif de désobéissance, fondements philosophiques et stratégiques de la désobéissance civile et Entrer dans l’âge de la non-violence (Le Relié).
Dimanche 15 juillet après-midi
Témoignages sur différents niveaux de désobéissance : Comment vivre en êtres responsables, sachant poser des actes, et non plus en sujets ?
avec :
– JB : Résistances et Internet
– Philippe Catinaud : Les semeurs volontaires
– Nicolas Gallon : La notion d’état de nécessité
et, dans le prolongement des deux journées précédentes :
Jean-Baptiste Libouban, Jean-Marie Muller, Frédéric Rognon.
– Animation : Nicole Bernard
– JB, blogger sur http://reflets.info, écrit sur les révolutions arabes et numériques. Il travaille depuis huit ans en tant qu’expert en sécurité informatique.
– Philippe Catinaud, membre de l’Arche (région Sud-Ouest), artisan semencier (Biau-Germe).
– Nicolas Gallon, Avocat au Barreau de Montpellier, a défendu à plusieurs reprises la cause des faucheurs volontaires, des déboulonneurs, des enseignants désobéissants et des refus de prélèvement ADN.
– Jean-Baptiste Libouban, Compagnon de l’Arche depuis près de 50 ans, initiateur des Faucheurs Volontaires.
– Nicole Bernard, dans le cadre de l’association "Médiation Aveyron", formatrice à la gestion des conflits et à la médiation pour des institutions et tout public.
Ateliers & Groupes de travail
Attention : le choix d’un atelier se fait au moment de l’inscription
Ateliers de réflexion
– Vendredi : La désobéissance civile chez Lanza del Vasto
En visitant ses actions et ses écrits, livres de sagesse ou d’engagement, nous irons à la rencontre de la pensée de Lanza del Vasto. Nous reprendrons ses travaux sur la loi, le pouvoir, l’autorité, l’état, les différentes formes d’obéissance, la vérité.... A travers ces perspectives, nous étudierons sa vision de la désobéissance civile, " cette forme extrême de l’action directe non-violente qui sauvegarde l’autorité tout en s’opposant à ses abus". Cela nous permettra de comprendre qui est Shantidas, "serviteur de paix", ce nom que Gandhi lui avait donné et qu’il s’efforça toute sa vie d’honorer. Jean-Baptiste Libouban, Compagnon de l’Arche depuis près de 50 ans, initiateur des Faucheurs Volontaires
– Samedi : Obéissance et soumission
Nous poursuivrons, dans un groupe plus restreint, les réflexions impulsées la veille au cours de la causerie : à partir des questions des participants, mais aussi de leurs témoignages vécus, nous chercherons à mieux cerner les mécanismes de la soumission et de l’obéissance, mais aussi les ouvertures possibles et les vecteurs de libération, c’est-à-dire finalement à mieux nous connaître nous-mêmes. Frédéric Rognon
– Dimanche : La désobéissance civile
Les principes développés dans l’exposé seront repris en les appliquant à des cas concrets... Jean-Marie Muller
Danse avec Jean-Luc Bremond
Cet atelier a pour but de s’initier aux danses du monde en cercle (Grèce, Serbie, Macédoine, Bulgarie, Roumanie, Israël, Klezmer, Irlande, Bretagne et autres régions de France). Il ne s’agit pas tant d’apprendre que de danser ensemble, simplement, tel un mini bal folk. Après une démonstration des pas de base, nous danserons en essayant d’une part de faire passer la musique dans les pieds et d’autre part de faire du cercle une ronde ouverte et vivante. Jean-Luc Bremond anime régulièrement des soirées de danse à la Borie Noble.
Chant avec Christophe Mercier
Chanter : un bonheur simple comme un sourire. A mi-voix, à tue-tête pour accompagner la marche, en duo ou en chœur mais toujours en cœur. Un bonheur intime qui se partage. C’est dans cet esprit que Christophe Mercier, issu d’une famille de musiciens de l’est de la France, nous fera chanter tous les matins dans son atelier. Il proposera également un atelier pour les enfants le dimanche après-midi.
Yoga et relaxation avec Margarete Hiller
Dans cet atelier, nous allons approfondir trois aspects importants du yoga :
– La respiration (pranayama), par l’observation du souffle et des exercices simples qui nous aident à retrouver une respiration profonde et régulière à chaque instant de la vie ;
– Les postures (asanas), qui nous emmènent à nous étirer en douceur et à nous sentir mieux dans notre corps ;
Le yoga-nidra, technique millénaire de relaxation, qui nous permet d’harmoniser
toutes les parties de l’être et de retrouver un sommeil profond et régénérateur.
Margarete Hiller, professeur de yoga et pédagogue, membre de l’Arche.
Résistances et Internet avec JB
– Atelier le samedi et le dimanche (possibilité de se joindre à l’atelier 1 le vendredi)
Si Internet a fait irruption depuis des années dans notre quotidien, le monde numérique reste étrange, lointain pour les non-initiés. Est-ce même vraiment un monde ? Ou simplement un outil ? Une technologie ? Les événements survenus depuis 2011 semblent répondre à cette question. Dans la lignée des révolutions arabes, le réseau s’est révolté et est entré en résistance pourvu de ses codes propres, de sa culture spécifique et de ses adversaires déclarés. Quels messages les "hacktivistes" apportent-ils ? Comment s’insèrent-ils dans une globalisation des résistances ?" JB, blogger sur “http://reflets.info”, écrit sur les révolutions arabes et numériques. Il travaille depuis huit ans en tant qu’expert en sécurité informatique.
Atelier Enfants de 8 à 12 ans
Atelier mis en place l’après-midi à partir de huit enfants.
– Peinture : Catherine Girardeau
– Jeux coopératifs : Philippe Cherpentier
– Musique : Christophe Mercier
Hébergement et organisation
Lieu
L’université d’été se déroulera sur l’ensemble du domaine : la Borie Noble, La Fleyssière, Nogaret, situé sur le plateau du Sud Larzac, à 20 km de Lodève. Le cadre du domaine de l’Arche participe à ce ressourcement par le mode de vie qu’il induit ; nous essayerons de nous y intégrer en restant à son écoute.
Ateliers
Chaque maison accueillera plusieurs ateliers : expression artistique, travail corporel, réflexion,... Ils auront lieu le matin. L’atelier choisi sera suivi pendant les trois jours de la session pour permettre une meilleure connaissance du sujet. Les enfants peuvent être intégrés aux activités du matin et sont pris en charge de manière spécifique l’après-midi.
Conférences et forums
Les temps de causeries, témoignages et de discussion auront lieu l’après-midi. Ils rassembleront tous les participants à La Fleyssière.
Animations
En début d’après-midi et en soirée : détente avec musique, danse, films, reportages, chants...
Repas
– Midi – le repas de midi est pris dans la maison où se déroule l’atelier et qui, en principe assure l’hébergement et le petit déjeuner (alimentation végétarienne)
– Soir – le repas du soir est pris à la Fleyssière, avec tous les participants, sous forme de cafétéria.
Conditions d’hébergement (camping, dortoirs, quelques chambres)
Le domaine qui nous accueille offre des possibilités d’hébergement simples et rustiques (pas d’électricité en général dans les chambres – apporter draps – prévoir des lampes de poche).
Dates
– Arrivée le 12 juillet en soirée (on peut arriver plus tôt avec un pique-nique) ou le 13 avant 9 h. *
– Départ le 16 juillet avant midi (ou un peu plus tard en accord avec une maison communautaire).
Accès
– En train, sur la ligne Millau-Béziers, descendre à la halte "Les Cabrils" (arrêt sur demande). *
– Une fiche "co-voiturage" sera disponible sur le site internet de l’association "Amis de Nogaret".