En réalité, cette situation est fragile car les populations dépendent entièrement de monopoles motivés par le profit plutôt que le bien-être humain. Le bilan écologique est désastreux sous la forme de "coûts cachés" : dégradation des sols, pollution et épuisement des eaux, atteintes à l’environnement et à la santé, perte des espèces et variétés végétales et animales adaptées, disparition des paysans avec leur savoir-faire ancestral. De fait, la croissance sous sa forme actuelle détruit autant d’emplois qu’elle prétend en créer. Les nuisances devenant évidentes, la pensée agroécologique émerge : notre planète est limitée et le "progrès" tel que défini est incompatible avec ses capacités. Continuer à piller les ressources naturelles risque de conduire à une sorte de dépôt de bilan planétaire dont les générations à venir auront à subir toutes les rigueurs.
A l’exigence de sécurité alimentaire, il faut adjoindre les aspects sociaux, économiques, écologiques, éthiques, sans lesquels nous retomberions dans un modèle qui ne demande qu’à renaître sous des formes apparemment humanisées mais en réalité tout aussi pernicieuses.
C’est pourquoi toute action risque d’être sans effet si les représentations mentales (répandues par la modernité marchande à travers média et publicité) ne cèdent pas la place aux valeurs fondées sur des réalités tangibles à la racine de la vie et de la survie. Rien ne changera vraiment si chaque conscience n’intègre au plus profond la nécessité de passer du “toujours plus” permanent, générateur d’accaparement continu sans véritable bien-être, à la satisfaction profonde et tranquille, issue de la sobriété et du partage.
Les 5 piliers du système alimentaire des pays riches
– Une production intensive sur des terres performantes, avec abus d’engrais chimiques, de pesticides de synthèse, de semences sélectionnées, de mécanisation, plus l’irrigation outrancière et l’énergie combustible non renouvelable pour la production hors-sol et hors-saison.
– Des transformations et des valeurs ajoutées industrialisées et conditionnées avec des emballages-déchets.
– Des transports et transferts à l’échelle de la planète avec des pléthores et des pénuries artificielles (“Libre Echange”)
– Des structures de distribution de masse (supermarchés) fondées sur la logique du profit financier.
– Un système publicitaire disposant de mass-media, créant des besoins nouveaux, entretenant désir, frustration et dépendance au Sud comme au Nord.
Comme conséquence, les systèmes productifs locaux autonomes peu coûteux en énergie et en transport disparaissent : agriculteurs, commerces, artisanat et petite industrie. Cela entraine la dégradation des échanges de proximité qui caractérisent un tissu social vivant et convivial.
« En se répétant presque mot pour mot d’une apparition à une autre, Rabhi cisèle depuis plus d’un demi-siècle le récit autobiographique qui tient lieu à la fois de produit de consommation de masse et de manifeste articulé autour d’un choix personnel effectué en 1960, celui d’un « retour à la terre » dans le respect des valeurs de simplicité, d’humilité, de sincérité et de vertu. Ses ouvrages centrés sur sa personne, ses centaines de discours et d’entretiens qui, tous, racontent sa vie ont abouti à ce résultat singulier : cet homme qui parle continuellement de lui-même incarne aux yeux de ses admirateurs et des journalistes la modestie et le sens des limites. »
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