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le 6 mai 2020

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Covid-19, Liberté, et Résistance !

par Arnaud Brulaire

Vivement le déconfinement ! Redevenir enfin libre !

Libre de sortir de chez moi, d’aller boire un verre avec mes amis, aller au cinéma, au parc public, à la piscine… Ah, ça fera du bien de retrouver ce que j’ai perdu pendant de si longs mois. D’ailleurs, j’ai envie de faire tout ce que je peux pour préserver cette liberté.

Pas vous ?

Il parait qu’elle est comme l’amour, qu’elle n’est jamais acquise, qu’elle se mérite. Elle est le fruit d’un effort de chaque jour, on parle même d’un combat… Contre qui, contre quoi ?

Monde d’après et inertie…

Combattre le coronavirus ? Sans doute. Nous devons faire notre possible pour éviter des morts. Mais ne nous y trompons pas, le virus n’est pas en guerre. Il existe, c’est tout. Il n’a aucune dent, même contre nous. Il essaie de vivre, comme nous. Croire que « nous sommes en guerre » contre un virus, c’est se tromper de combat. Car se battre contre les phénomènes naturels sans en comprendre les causes, c’est se battre contre des moulins à vent. Vouloir détruire un virus sans voir que nous en avons favorisé le développement, c’est méconnaitre ou nier la réalité du monde.

Ce virus, il me fait peur… et il me rassure en même temps.

J’ai peur quand je pense à ceux qui souffrent : les victimes d’abord (dont je pourrais faire partie), le personnel soignant en première ligne, et tous les oubliés du système dont le rôle nous apparait aujourd’hui comme essentiel (routiers, caissières, enseignants, agriculteurs...). Sans oublier chacun d’entre nous, à des degrés différents, pris dans la panique, la promiscuité, ou l’ennui que suscitent ce confinement.

Et pourtant il me rassure vous dis-je. Égoïstement d’abord, parce que je ne me sens pas fou, comme toutes celles et ceux qui tirent la sonnette d’alarme depuis tant d’années... Certains diront qu’il n’y a aucun lien entre cette pandémie et la crise écologique, mais c’est pourtant bien le cas. Pour s’en convaincre il suffit de comparer les arguments des scientifiques [1] à ceux qui le nient, fussent-ils d’anciens ministres [2] … La perte de biodiversité, le recul des écosystèmes, le changement climatique, la surconsommation et la mondialisation des échanges sont bien des facteurs favorisant la crise sanitaire que nous connaissons aujourd’hui.

Je ne suis pas fou donc… la belle affaire ! Je préférerais l’être et que le vivant ne décline pas, et nous avec. Ce qui me rassure vraiment, me remplit d’espoir, c’est que ce petit virus va peut-être nous ouvrir les yeux. On entend beaucoup parler du « monde d’après », qui ne pourra pas être comme « le monde d’avant », que nous devrons en tirer des leçons pour inventer une nouvelle manière de vivre… Si seulement ! Si cette crise nous amène à relocaliser la fabrication de nos médicaments, de nos équipements médicaux, et à soutenir nos agriculteurs (bio de préférence), nous aurons fait des progrès, certes. Mais ne nous arrêtons pas là ! Car si dans le même temps nous continuons de consommer à gogo, de brûler du carburant, et que nous investissons des milliards d’euros pour sauver l’aviation [3] plutôt que d’aider ses employés à transiter vers les métiers « bas carbone » de demain, alors nous resterons schizophrènes, incapables d’agir avec cohérence et efficacité. Car il est temps de le comprendre : la crise climatique qui s’annonce avec un monde à +3°C ou plus (la tendance actuelle est à +7°C d’ici 2100 [4] ) engendrera bien plus de morts que celle du coronavirus. On parle de milliards de morts cette fois ! Et nous avons 10 ans pour infléchir radicalement la courbe des gaz à effet de serre. Dans 10 ans il sera trop tard, eu égard à l’inertie du changement climatique, qui fait écho à la nôtre…

Bonheur et CO2…

Ce qui me fait espérer c’est qu’une partie d’entre nous, qui ont la chance de ne pas vivre à moins de 10m2 par personne et d’être payés pendant le confinement, découvriront peut-être que ralentir est profitable, et parfois même agréable. Ralentir pour comprendre. Sentir à quel point l’humanité est fragile, à quel point JE suis fragile sans l’aide des autres, et face à la nature qui se défend. Découvrir que je ne connaissais pas cette part de moi qui, comme un lion en cage, fuyant l’ennui, s’est mise à écouter ses peurs, à les apprivoiser, les regarder en face, et à se demander : « au fond, qu’est-ce qui me rend vraiment heureux ? ». Celle qui s’est mise à ressentir la différence entre distraction et émancipation, entre plaisir et bonheur. Manger du Nutella devant Netflix, jouer aux jeux vidéos, surfer sur internet toute la journée, quel pied ! Pendant un temps… et puis je me sens mal, je sens bien qu’il y a un truc qui cloche, qui manque. Ce qui me rend vraiment heureux, au fond je le sais, c’est de voir les gens que j’aime en chair et en os (ras le bol de Whatsapp, Facebook, Instagram…), embrasser mes enfants, mon amour, c’est aller faire du sport avec mes potes, boire un verre, aller me balader en forêt, nager, faire du vélo, discuter, blaguer, jouer de la musique, danser, aller à un concert, cultiver un potager (ah oui ça serait cool ça, au cas où ce soit plus grave un jour !)…

Alors je me mets à rêver que lorsque ce confinement sera terminé, nous prendrons conscience de tout ça. On réalisera que ce qui nous rend vraiment heureux… ça n’émet même pas de CO2 ou si peu ! Et que si jamais je ressens l’envie de prendre l’avion pour mes prochaines vacances, j’y réfléchirai à deux fois en me disant : « est-ce que 2 semaines d’évasion rapide valent la peine de détruire tout espoir de bonheur pour moi et les générations futures ? »

J’en entends déjà certains : « Oh t’y vas fort là quand même… Je peux bien prendre l’avion une fois par an alors que je n’ai pas de voiture et que je mange bio, de saison, et presque pas de viande » ! Bien sûr, vous pouvez le faire. Mais sachez qu’un vol en avion ruinera toutes vos « bonnes actions » de l’année… Parce qu’un aller-retour Paris-New York ça fait 2T de CO2e [5], soit notre quota individuel et annuel pour respecter l’accord de Paris, et ne pas provoquer la catastrophe climatique mondiale annoncée. Ce n’est pas facile, c’est sûr, de diviser par 6 notre empreinte carbone (12T pour un français moyen, 20T pour un américain, 1T pour un Bengali). Mais c’est un combat pour la vie. Mieux, un combat pour la liberté !

Perdre pour gagner…

La liberté ? Mais comment me sentir libre quand je ne peux pas bouger ? Avec ce virus qui m’empêche d’aller où je veux quand je veux… Je m’interroge néanmoins : comment exprimerai-je ma liberté après le Covid-19 ? Aurai-je besoin de l’avion et de la voiture pour y goûter de nouveau ? A-t-on attendu ces engins pour apprécier la liberté ?

Avec ce confinement, j’ai beaucoup perdu mais j’ai surtout gagné.

J’ai perdu ma liberté de me déplacer. Mais j’ai gagné du temps, avec moi-même, ma compagne, mes enfants. Du temps pour réaliser le boulot de ceux qui s’en occupent si souvent : merci les enseignants ! Du temps pour nous écouter, nous parler, nous observer, nous comprendre, nous découvrir aussi. Du temps pour téléphoner à ma famille, mes amis, et vraiment discuter. Redécouvrir qu’on se dit tellement plus qu’avec mille émoticônes !

Depuis qu’il y a moins de voiture, j’ai la liberté de respirer un air plus pur. Comment rester libre si je suffoque ?

J’ai gagné la liberté d’écouter le silence, les oiseaux, la nature. J’ai moins mal à la tête qu’après des heures avec Netflix, Facebook, Twitter…

J’ai gagné la liberté d’exister plutôt que de faire, penser plutôt que produire, sentir plutôt que planifier, vivre « maintenant » plutôt que « demain ».

J’ai découvert aussi que je ne connaissais pas mon quartier, et qu’on en voit des gens à moins d’1km de chez soi ! Qu’on leur parle même… Et qu’on aime ça. Et dire qu’après le covid je pourrai aller bien plus loin, même en vélo, même à pied ! Avant j’étais tellement libre d’aller où je veux, de partir loin, que je n’avais pas pris le temps de voyager proche…

Bon c’est facile quand on a le temps, mais le temps c’est de l’argent. Et j’en ai besoin ! Pour la plupart d’entre nous, gagner de l’argent ça prend effectivement du temps… Metro, boulot, dodo… J’ai bien connu. Et puis j’ai décidé de réduire la voilure, quitter Paris, gagner moins pour vivre plus. Et ça tombait bien pour la planète aussi, puisque la moitié de notre empreinte carbone vient de ce qu’on consomme, des produits importés pour la plupart [6].

Bien sûr il faut un salaire minimum pour vivre dignement, et nous devons nous battre pour plus de justice sociale, et une meilleure répartition des richesses. En travaillant moins j’en laissais plus pour les autres. Le temps de nous organiser pour l’après… Quand le pétrole viendra tellement à manquer qu’on devra coopérer, qu’on sera nombreux à réinvestir les champs, pour cultiver la terre qui nous nourrit [7]. Pas sûr qu’on tienne les 35h alors, mais on aura peut-être appris à être heureux malgré tout, entre temps.

Résistance et liberté…

En devenant « résistant climatique [8] » je ne me suis pas privé. Ne plus prendre l’avion, rouler beaucoup moins en voiture [9], ne plus acheter de produits neufs (ou presque), c’était le renoncement qui me rendait plus libre. Parce qu’être libre ce n’est pas faire tout ce qui me plait et succomber à mes désirs (ne dit-on pas « être esclave de ses désirs » ?). Je me sens libre quand je suis capable de renoncer à certaines choses pour obéir à ma volonté, librement choisie. Celle de préserver ma vie et celle des autres. Je n’ai rien inventé, c’est la déclaration des droits de l’homme qui le dit (article 4) : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ». Et nous savons aujourd’hui que ces autres incluent le vivant dans son ensemble, plantes et animaux, dont nous dépendons.

Passerelle Eco n°73 : Entrons en Résistance Climatique

Résistance Climatique Avec la crise du covid, on voit tout à coup qu’on peut réaliser des changements insoup­çonnés du monde et de nos habitudes. Et on mesure encore une fois que le basculement (...)

Je ne suis pas libre de passer au feu rouge, ou d’aller flinguer mon voisin parce qu’il m’a mal parlé. Alors pourquoi ne devrais-je pas renoncer à la liberté de faire des milliers de km en avion ou d’acheter des tas de trucs inutiles ? Sachant que ces actes-là vont finir par me priver de mes libertés essentielles et celles de nos enfants : manger, boire, se loger, se vêtir, respirer un air propre à moins de 45°c … « Les abus de la liberté tueront toujours la liberté » disait André Maurois.

Je veux me battre pour que ce « monde d’après » préserve l’essentiel, mais je sais bien que mon action individuelle ne suffira pas. Nous aurons plus de chance si nous sommes nombreux à le faire bien sûr. Et cela deviendra réaliste quand le monde politique nous y aidera vraiment, en ne nous poussant plus à la croissance économique, en soutenant les paysans vertueux, les services publics, en relocalisant l’économie, en mettant à notre disposition plus de trains, de pistes cyclables…

Mais pour que l’état nous aide, pourquoi ne pas commencer à lui montrer que c’est possible, lui montrer que nous sommes prêts à accepter les changements qui devront s’imposer un jour ou l’autre ? Leur montrer que même dans des conditions très défavorables, une minorité de « volontaires-empathiques » parviennent à tracer la voie. Être « résistant climatique » ce n’est pas s’ériger en modèle, c’est user de son petit pouvoir pour mieux soutenir ceux qui n’en n’ont pas, par l’action collective et politique nécessaires à ce fameux « monde d’après ».

En fait, je suis d’autant plus heureux d’être résistant climatique que je me sens vraiment libre et acteur d’un monde qui, au fond, aimerait bien éviter de futurs confinements…

par Arnaud Brulaire

Notes

[5CO2 équivalent, l’unité de mesure des émissions de gaz à effet de serre

[6Comme le démontre Hervé Kempf (livre « comment les riches polluent la planète »), notre pollution est proportionnelle aux biens manufacturés qu’on achète.

[7Cf. le formidable guide des « Greniers d’abondance » : https://resiliencealimentaire.org

[92000km/an et par personne, soit 0,5T de CO2e sur notre quota annuel de 2T


10 votes

2 messages

  • Covid-19, Liberté, et Résistance !

    Le 20 novembre 2020, par Ludovic LESDOS

    Bonjour et Merci Arnaud BRULAIRE,pour cette discussion sur le COVID-19.Je dis vivement le déconfinement et que l’on puisse sortir dehors sans porter de masque,et que l’on revoie les sourires ;surtout ceux des enfants.Ce qui ce passe en ce moment c’est de l’emballement.Mais de toute façon nous sommes au bord de l’effondrement.Et puis des épidémies il y a toujours eu,et il y en aura encore aussi longtemps que l’humanité n’ira pas dans le bon sens.

  • Covid-19, Liberté, et Résistance !

    Le 19 novembre 2020, par sylvia

    bonsoir ! j’ai pas tout lu mais suis bien étonnée de lire que vous comptez encore sur un gouvernement :menteur /voleur/ pervers/ autodestructeur et dont le but n’est pas d’aider les autres ! juste eux à vivre et nous obligé à survivre et surtout pas à vivre ! car le corrona n’a jamais été un tueur bien loin de là et c’est la D.E. du secourisme urgentiste qui parle avec sa logique médical et les protocoles ! donc comment encore demander et démontrer à des gens qui ne veulent que la réductions massive des populations et rien d’autres !!! quand les gens comprendront-ils qu’il est devenu vital de chercher des endroits loin de ces monstres et de ne plus jamais les "calculer" dans nos vies et que tous les gouvernements qui veulent vivre doivent avoir leur point de vue (du N.O.M) et pas un autre et surtout pas leur propre point de vue !!!! dons se débrouiller seul entre nous et pas avec des autorités qui ne seront jamais pour l’écologie et le respect de TOUTES LES VIES ! ......

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