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le 9 avril 2007

DOSSIERS

Torri Superiore, un processus d’écovillage en cours

Après les présentations de l’écovillage de Findhorn en Ecosse (dans Passerelle Eco n°13), l’écovillage de Crystal Waters en Australie (dans Passerelle Eco n°17, ainsi que [les Fermes Libres du Jura (Voir les Petites Chroniques des Ecolieux dans plusieurs revues - qui ne sont pas un village à proprement parler - et CES au Tessin – qui n’est pas habité toute l’année -, mon idée, c’était de voir à quoi ressemble un « vrai » écovillage en pays latin.

Cette présentation de l’écovillage de Torri Superiore a été initialement publiée dans la revue Passerelle Eco n°19, revue d’écologie pratique et d’alternative écovillage

Vintimille, vous voyez ?

Là où dans le temps on sortait ses papiers pour passer la douane entre la France et l’Italie, là où la Côte d’Azur devient Côte Ligure et où le français « avé l’assent » le cède à l’italien que l’on parle aussi avec les mains… Bon. Vous quittez le bord de mer, vous prenez la petite route minuscule qui passe sous le pont en béton de la nationale et vous grimpez dans les collines derrière la ville. Rasez des murs, longez la rivière, traversez quelques hameaux et vous vous retrouvez à Torri, beau village ancien construit comme une petite forteresse labyrinthique toute en pierres du pays, ceint de quelques maisons modernes et asphyxié de voitures parquées jusque sur le pont où le petit autobus passe encore à peine.

Là, levez le nez et voyez : accroché à la montagne, une espèce de château rustique ou un hameau accroché à la montagne : Torri Superiore, vieux bourglongtemps abandonné de ses habitants descendus refaire leurs maisons plus près de la rivière ou des commodités de la ville, et maintenant reconstruit et habité par quelques familles amoureuses de cette culture de la pierre, imprégnées d’écologie et animées de la volonté de vivre sur un mode durable et alternatif.

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Torri Superiore, dans Passerelle Eco

Tout a commencé vers la fin des années 80.

Un premier groupe assez hétérogène est arrivé de la grand’ ville pour échapper au métro-boulot-dodo, avec l’intention de vivre en harmonie avec la nature et avec euxmêmes.

Ils ont fondé une association culturelle ayant pour buts

  1. le rachat des maisons et des terrains,
  2. l’installation permanente ou temporaire des membres de l’association sur les lieux dans une structure de type communautaire,
  3. le développement d’activités économiques de type artisanat et accueil, et
  4. la mise sur pieds d’un centre de recherche sur le respect de l’environnement et des droits de l’homme.

Cette première équipe était toute à l’image de la fin des 30 glorieuses : les pays industrialisés prenaient conscience de la nécessité de réagir tant individuellement que collectivement à l’exploitation éhontée des ressources naturelles, au consumérisme effréné, à l’arrivisme, au pillage des richesses «  du Sud », et à l’indifférence aux signes de souffrance de la planète.

Ceux-là ont eu la force et la clairvoyance et les moyens de commencer le rachat du domaine bâti - qui n’était pas très cher à l’époque, mais n’ont pas su se garder des conflits internes et des difficultés économiques…

La terre, du foncier et de l’agriculture

Il faut savoir aussi que dans ce coin de pays, le problème de la propriété est épineux : en effet les anciens, pour éviter que leurs enfants ne revendent ce qui à leurs yeux devait rester un, ont réparti les héritages par tous petits morceaux, de telle sorte que dans ce « château de 162 pièces », il arrive qu’il y ait jusqu’à 4 propriétaires pour une seule pièce !

Et pour la terre, qui est toute en terrasses et en oliviers alentour, c’est pareil : les lots sont éparpillés dans la géographie et comportent parfois juste une dizaine d’arbres.

Depuis la fin de la culture paysanne où le village cultivait en commun et s’entraidait pour les récoltes et les travaux de la terre, plus personne ne veut de si petites parcelles dont la culture est trop coûteuse, et de ce fait, des pans entiers de colline ont été laissé à l’abandon et les belles terrasses de pierre sèche s’écroulent petit à petit.

Depuis sa création, l’association s’acharne donc à racheter pied à pied et le bâti et la terre …

Aujourd’hui, une équipe renouvelée

Aujourd’hui, le projet ambitieux du départ a vécu, l’équipe est entièrement renouvelée, tous les fondateurs sont partis et ont été remplacés : 11 adultes venus d’Allemagne et d’Italie y vivent en communauté avec leurs 5 enfants et occupent la majeure partie de Torri Superiore. Il y vit encore deux ou trois autres familles qui ont choisi de rester hors communauté.

Chaque famille a son espace propre dont elle est propriétaire ou locataire, et contribue à la coopérative qui assure l’entretien et l’animation de l’espace d’accueil, où se prennent aussi les repas en commun.

Ils ont ainsi construit une structure juridique gigogne, à l’image de leur village tout en sous-ensembles imbriqués : propriétés individuelles, habitat communautaire, locations, entreprise coopérative, avec une association qui chapeaute le tout…

Les activités

A Torri Superiore, pas le temps de se tourner les pouces, on travaille beaucoup mais avec bonheur : qui au jardin, qui au chantier, au bureau, au ménage, aux cuisines et à l’accueil ...

L’humour et la bonne humeur sont sensibles, les enfants courent dans les superbes labyrinthes voûtés entre terrasses et tas de sable.

Pour les adultes, l’effort principal est mis sur la reconstruction des tours dans le respect du style traditionnel et l’agrandissement du domaine habitable : d’ores-et déjà la communauté reçoit des vacanciers et des promeneurs, accueille des volontaires tout au long de l’année pour les aider dans les tâches quotidiennes, organise des chantiers, des cours de shiatsu, yoga, permaculture, design d’écovillages et …de processus de décision par consensus.

A part ça, question spiritualité, chacun fait comme il l’entend, dans ce paysage rugueux où marcher et travailler la terre peut se comprendre comme une prière.

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Elevage de chèvre à Torri Superiore, dans Passerelle Eco

Une gestion attentive des relations humaines

Car cette nouvelle équipe-là, précisément, est devenue très consciente de l’extrême importance de la gestion de la relation humaine pour assurer la durabilité d’un projet quel qu’il soit. Non seulement, ils utilisent le processus du consensus pour toute décision interne à leur propre groupe, mais ils l’enseignent.

Lucilla et Massimo, qui sont le couple porteur du projet et les animateurs des sessions de permaculture et consensus, affirment même que ce qui définit un écovillage, plus que l’économie équitable, les énergies alternatives ou les matériaux de construction, c’est le mode décision, la gestion du pouvoir, une gouvernance transparente et participative.

Avec la méthode du consensus, chacun a non seulement le droit mais le devoir de faire valoir son opinion, et chacun peut à tout moment bloquer une décision, même s’il ou elle est seul(e) de son avis.

Il n’est plus question ici de majorité ou de minorité. On changera la formulation de la décision en question jusqu’à ce qu’elle soit au moins admissible sinon satisfaisante pour tout le monde, de façon à ce que cette décision soit soutenue par l’ensemble : plus de résistance passive, plus de majorité silencieuse qui laisse faire, plus de victimes potentielles…

Donner la parole à ceux qui d’habitude ne l’ont pas, limiter celle de ceux qui d’habitude imposent leur discours : le consensus tel qu’il se pratique ici, ce n’est en rien le compromis mollasson du langage commun.

C’est plutôt carrément une « révolution culturelle », un autre façon d’être dans la collectivité. En tous cas, à Torri Superiore, c’est un choix

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Un écovillage est toujours une combinaison particulière des paramètres sociaux et techniques.

Ici, l’accent est mis délibérément sur le social, disant que : « Les crises de quelque nature qu’elles soient provoquent toujours des tensions dans les relations humaines ; si la vie matérielle devenait plus difficile, nous estimons qu’il est plus important d’être en mesure de maintenir le contact entre nous et avec les gens du village que de produire tout seuls notre propre énergie. Nous nous occupons donc en priorité de prise de décision et de résolution de conflits et reconstruisons le bourg dans le respect de l’architecture traditionnelle.

Bien sûr nous visons l’autonomie énergétique et économique. Mais cela prendra seulement un peu plus de temps qu’ailleurs ! »

A Torri Superiore, on trie ses déchets comme tout un chacun qui a des poules à nourrir, avec en prime des conteneurs différenciés papier/verre/non recyclables. Malgré quelques panneaux solaires, on est par ailleurs branché au réseau électrique du village, on envoie ses eaux grises et noires dans les égouts communaux et on se fournit en matériaux de chantier ordinaires, outre la chaux, le liège et le silicate de calcium (pour l’isolation), et le bois d’olivier pour les encadrements des portes. Même si l’on se chauffe au bois et au gaz, dans l’ensemble Torri Superiore ne cherche pas à jouer le rôle de modèle au niveau de l’habitat.

Par contre, on cultive le jardin selon les préceptes de la permaculture, on monte à pied au sommet de la colline pour remettre en état les terrasses, tailler les arbres et récolter les olives. On complète la production potagère en se fournissant auprès de réseaux de distribution alimentaire biologiques et on y mange délicieusement bien : la nourriture est variée, savoureuse et de toutes les couleurs.

Question économie

Il y a bien sur ce que paient les hôtes de passage et les stagiaires, mais cela ne suffit de loin pas à faire vivre la communauté.

On élève aussi des chèvres et une petite bassecour, et on presse l’huile de ses olives, mais ce sont seulement les hôtes qui en profitent, car la règlementation européenne met la vente totalement hors de portée de cette petite association culturelle.

Plusieurs membres ont des boulots à l’extérieur et alimentent la caisse commune, mais l’argent manque réellement : ici la simplicité volontaire n’est pas qu’une éventualité conceptuelle !

Un écovillage reproductible ?

Alors, en somme, qu’en est-il de ce modèle d’écovillage qui devrait pouvoir faire école ?

De toute évidence, les choses se passent autrement en Australie qu’en Europe, et encore autrement en Europe anglo-saxonne qu’en pays latin.

Et encore autrement en France – où les gardiens de l’esprit cartésien ont tendance à voire des §€ct€s derrière le moindre projet alternatif et collectif – qu’en Italie, où il faut avoir des « cousins » bien placés dans les institutions pour pouvoir se mettre en règle avec les autorités de contrôle qui préservent l’ordre établi.

Ceux de Torri Superiore ont trouvé leur manière à eux : ils se sont glissés dans la vallée, sans bruit, faisant profil bas et montrant d’abord qu’ils savaient travailler et élever leurs enfants, comme tout le monde.

Dès que possible, ils ont ouvert leurs portes et invité les gens du village à venir voir et constater par eux-mêmes ce que devenait le vieux bourg et comment on y vivait.

Depuis, ce sont ceux d’en-bas qui racontent plus loin ce qu’ils ont vu, tissant l’indispensable toile de notoriété publique autour de la petite communauté alternative.

Désormais, on y vient en famille pour des repas de mariage ou d’anniversaire et même, on montre le vieux bourg comme une curiosité aux parents de passage !

Par ailleurs, Lucilla et Massimo sont à l’origine du réseau italien des écovillages dont ils animent les réunions sur le mode du consensus.

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L’équipe du Réseau Ecovillage à Torri Superiore

Conseil pour créer un écovillage

En guise de conclusion, nous avons demandé aux habitants de Torri Superiore leur conseil pour créer un écovillage.

Voilà leur réponse :
— « Vous voulez faire un écovillage ?
Trouvez la terre, inventez tout ce que vous voulez, mais donnez-vous les meilleures chances de survie :

  1. partez en groupe,
  2. achetez la terre et le bâti en commun,
  3. faites usage des outils et dispositifs de gestion de la communication qui ont été mis au point et éprouvés dans les écovillages : cercles de paroles, décision prise au consensus, ... »

 Cette présentation de l’écovillage de Torri Superiore a été initialement publiée dans la revue Passerelle Eco n°19

 voir le site en italien : http://www.torri-superiore.org/


18 votes

5 messages

  • Torri Superiore, un processus d’écovillage en cours

    Le 15 juin 2007, par Fanny

    c est absolument envoutant !!!!!!! votre village de pierres et de couleurs..... Je me présente : je suis une femme divorcée qui est depuis deux ans sur l île de la Reunion et qui désire se rapprocher et vivre ds un écho village car ma voie est celle de revenir à la source.....:juste ETRE dans l amour inconditionnel, et donner le meilleurs de moi meme, dans ce meme amour . Je desire me poser ; ( j ai 48 ans en juillet), et je voudrais continuer ma vie pres de personnes sur la meme longueur d onde que la mienne...’( et j en ai besoin pour mon cheminement personnel !) Donner , prendre , partager et apprendre...... Vivre est une eternelle experience ou chaque jour nous devons grandir et s élever !!..... et je suis en apprenti......sage vers celà.... Mais voila ma vérité : je n ai plus d emploie et suis redevenue RMIste......... j ai un CAP petite enfance et surtout une montagne d amour a donner..... Je voudrais aller vers un coins ou le soleil se montre plus qu une fois le mois et ou se trouve Dame Nature....... c est tout ce que je désire ; je viens vous demander que me conseillez vous ??? je vous prie de croire a mes salutations tres respectueuses et que votre Lumiere éclaire l Univers !... Fanny

    Voir en ligne : http://soleildamour.aceblog.fr/

    • Torri Superiore, un processus d’écovillage en cours

      Le 29 mars 2008, par Florence

      Bonjour,

      si vous êtes toujours à la recherche de vivre ce projet, un projet est en gestation à la Réunion... peut être pourrez vous nous apporter votre énergie et votre engagement.

      • Torri Superiore, un processus d’écovillage en cours

        Le 5 décembre 2008, par Sylanf

        Nous sommes un jeune couple marier et nous avons aussi le projet de vivre en harmonie avec la nature. Nous allons nous installer sur l’ile de la réunion en Avril 2009. Si vous lisez ce message merci de nous contacter sur ce mail : sylanf@hotmail.com Amicalement

      • Ile de la Réunion

        Le 21 avril 2009, par Maud

        Bonjour Florence, Comment vous contacter pour discuter ? (email..). Maud

      • Pour Florence, Un projet à la réunion ?

        Le 29 novembre 2011, par julie31

        Bonjour, je suis de Toulouse et je souhaite découvrir le milieu des ecovillages, les différentes dimensions à prendre en compte pour réaliser un tel projet, et d’en connaitre les étapes... je souhaite actuellement me former à différentes techniques alternatives ! Cette phase d’investigation commence par la rencontre de plusieurs écolieux, de leurs participants ... Je me rends à la Réunion pendant les vacances de Noël, souhaitant poursuivre mon investigation.

        Votre projet est il toujours d’actualité ? Si oui pourrais je prendre votre coordonnées, et vous contacter ?

        Merci

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