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Rapport du sénat Juillet 2012

le 27 mai 2013

Développer la coopération dans le domaine de l’habitat

Donner un statut juridique aux coopératives d’habitants

L’habitat coopératif est un phénomène récent et encore embryonnaire en France. Selon l’association Habicoop, il y aurait une cinquantaine de groupes d’habitants recensés sur l’ensemble du territoire qui travaillent pour faire aboutir leur projet. Encore au stade de l’innovation sociale, ce mouvement recèle cependant un vrai potentiel de développement comme votre rapporteur l’a souligné précédemment en rappelant le poids que l’habitat coopératif représente dans d’autres pays, comme la Suisse ou le Québec et l’Italie.

L’habitat coopératif : une innovation sociale

Les coopératives d’habitants instituent une forme de propriété collective qu’on pourrait qualifier de « propriété partagée ». Dans ce schéma, c’est une société coopérative qui est propriétaire de l’immeuble et qui est destinée à le demeurer. Cependant les habitants ne sont pas seulement locataires des logements : ils possèdent les parts sociales qui constituent le capital social de la coopérative. Ils possèdent donc la société qui est propriétaire de l’immeuble. C’est pourquoi il est préférable de parler de propriété « partagée » que de propriété « collective ». Comme il est précisé dans l’article ci-après, la notion d’habitat coopératif recouvre en fait deux modèles économiques différents.

Deux modèles possibles de Coopératives d’habitants

Quel que soit le modèle retenu pour monter un projet de coopérative d’habitants, un certain nombre d’objectifs et de traits fondamentaux communs se retrouvent.

En premier lieu, il s’agit d’un outil qui permet de rendre inopérante une approche spéculative de l’immobilier. La logique coopérative recentre en effet le logement sur sa valeur d’usage (c’est un bien qui permet de répondre à un besoin réel). L’immeuble partagé est la propriété de la coopérative et il est donc utilisé conformément à l’objet social de cette dernière, à savoir répondre au plus faible prix possible au besoin de logement des coopérateurs. Si les prix de l’immobilier augmentent, la coopérative, à la différence d’un bailleur privé, n’a aucune raison de répercuter cette hausse sur les loyers qu’elle fait payer aux coopérateurs. La coopérative ne réalise en effet pas de bénéfices sur ses membres puisque ces derniers ont précisément constitué la coopérative pour réduire le coût d’accès au logement ! De même, quand un habitant quitte la coopérative, il cède ou se fait rembourser ses parts sociales à leur valeur nominale, sans réaliser de plus-value. Les coopératives peuvent évidemment mettre en place un mécanisme de revalorisation des parts permettant d’éviter que leur valeur s’érode avec le temps sous l’effet de l’inflation. Mais maintenir la valeur de l’épargne des coopérateurs est une chose, accroître cette valeur sous l’effet de la hausse du marché de l’immobilier en est une autre.

En second lieu, la propriété coopérative change la façon de penser le vivre-ensemble ; c’est un autre aspect de la notion de propriété partagée :

 la gestion du bien commun se conforme en effet aux principes de gouvernance démocratique de la coopération, selon la règle « une personne égale une voix », quel que soit le nombre de parts sociales détenues ;

 la gestion de la propriété partagée est en outre positivement influencée par la double qualité de sociétaire et d’utilisateur des coopérateurs. Ces derniers, quand ils prennent une décision concernant leur immeuble, ont en effet systématiquement le double point de vue du propriétaire et de l’usager, ce qui n’est pas toujours le cas dans une assemblée de copropriétaires classique. Un propriétaire individuel n’est pas toujours utilisateur de son logement et, même quand il l’est, ses décisions peuvent être influencées, voire déterminées, par des considérations liées au rendement financier qu’il peut espérer de son bien. En recentrant la valeur des immeubles sur leur valeur d’usage, la double qualité réduit donc les risques de divergence d’intérêts entre le point de vue des utilisateurs de l’immeuble et celui de ses propriétaires ;

 plus fondamentalement encore, les habitants qui se regroupent pour créer une coopérative conçoivent ensemble leur projet d’habitat, les caractéristiques de leurs logements et des espaces communs, ainsi que les valeurs partagées et le fonctionnement de la coopérative. Buanderie, salle commune, chambre d’amis, jardin, atelier de bricolage, lieu de stockage : la propriété partagée permet de créer et de gérer ensemble des espaces communs supports d’une véritable coopération de voisinage. La coopérative d’habitants n’est plus alors la simple juxtaposition d’habitants réunis dans un même cadre de vie, comme l’est une copropriété classique, mais une entreprise commune reposant sur un affectio sociétatis fort et une vision partagée du voisinage. Enfin, la location permet aux membres de la coopérative une flexibilité au regard des événements de la vie, en changeant de logement dans la coopérative ou en diminuant la superficie d’occupation.

Des obstacles juridiques qu’il convient de lever

Les obstacles liés à la loi du 10 septembre 1947

C’est jusqu’à présent la loi du 10 septembre 1947 sur la coopération qui, faute de mieux, est utilisée par les porteurs de projet pour développer les coopératives d’habitants. Cependant cette loi n’a pas été pensée pour accueillir des projets d’habitat en propriété collective et il serait donc utile de définir une nouvelle forme de sociétés coopératives. Les principaux points qui appellent une intervention du législateur sont les suivants :

 l’encadrement des conditions de cession des parts entre coopérateurs. Aux termes de l’article 11 de la loi de 1947, cette cession est soumise à l’approbation soit de l’assemblée générale, soit des administrateurs, ou gérants, dans les conditions fixées par les statuts. La cession n’est donc pas libre dans le droit existant. Ceci étant, l’immobilier est un domaine sensible et prévoir un encadrement légal du prix de cession serait opportun. Il pourrait se traduire par une cession basée sur la valeur initiale de la part sociale, indexée au coût de la vie (rente viagère), toute autre vente n’étant pas reconnue valable ;

 la possibilité de pratiquer des loyers au coût réel. Il est nécessaire pour cela d’autoriser la coopérative à fixer le montant des loyers à un niveau inférieur à celui du marché sans pénalisation juridique ou fiscale. Le respect des règles de la concurrence impose que cette faculté concerne exclusivement les loyers perçus auprès des coopérateurs, puisque par rapport à eux la coopérative n’est pas dans une logique commerciale mais dans une logique non lucrative de minimisation du coût d’accès au logement ;

 la possibilité de moduler les loyers demandés aux coopérateurs selon des critères comme l’ancienneté et la contribution à l’apport initial. En effet, comme cela a été indiqué, la charge financière de la construction ou de l’acquisition d’un immeuble coopératif pèse proportionnellement plus sur les coopérateurs les plus anciens. Or, les loyers payés par les coopérateurs sont déterminés par la surface qu’ils occupent et non par leur ancienneté d’occupation des locaux. Ce système conduit donc les occupants les plus anciens à subventionner le prix du logement des coopérateurs les plus récents. D’où l’intérêt de moduler les loyers selon l’ancienneté pour corriger ce phénomène. Cependant, pour l’instant cette modulation se heurte à l’article 4 de la loi de 1947 qui prévoit que, sauf si une loi particulière en dispose autrement, les associés d’une coopérative disposent de droits égaux dans sa gestion et qu’il ne peut être établi entre eux de discrimination suivant la date de leur adhésion. Le législateur doit donc intervenir pour écarter l’application de cet article dans ce cas précis ;

 la facilitation des opérations avec les tiers. L’article 3 de la loi de 1947 dispose que les coopératives ne peuvent admettre les tiers non sociétaires à bénéficier de leurs services, à moins que les lois particulières qui les régissent ne les y autorisent. Or, les coopératives d’habitants demandent à pouvoir bénéficier d’une telle dérogation car, si leur objet principal est bien de fournir à leurs membres l’usage ou l’usufruit d’un logement à titre de résidence principale, il n’en reste pas moins qu’à titre accessoire elles peuvent avoir intérêt à réaliser aussi quelques opérations, dont le produit leur permet d’atteindre un équilibre financier (par exemple louer de façon ponctuelle la salle commune ou des espaces communs à des tiers extérieurs). Pour éviter toute dérive commerciale cependant, l’autorisation de délivrer ainsi des services à des non coopérateurs devrait être encadré (ces opérations ne devraient pas représenter plus d’une fraction déterminée du chiffre d’affaires de la société coopérative, par exemple 20 %) ;

 la détermination du régime fiscal applicable aux coopératives d’habitants. Les coopératives d’habitants sont dans une relation non lucrative vis-à-vis de leurs membres et elles ne dégageront donc pas de bénéfices par rapport à eux si on les autorise à pratiquer des loyers à prix coûtant. Sous cette condition, leurs seuls bénéfices proviendront des opérations avec les tiers, qui eux doivent être imposés à l’impôt sur les sociétés dans des conditions normales pour des raisons de respect des règles concurrentielles. Il est également important de prévoir une disposition permettant aux coopératives de provisionner sur une longue période en vue de réaliser des travaux (provision « grosses réparations »). Au niveau des coopérateurs, la cession des parts sociales (initiales ou acquises), qui constitue le droit d’entrée dans la coopérative, devrait être assimilée à une vente de résidence principale et être imposée dans les mêmes conditions. C’est la condition pour instaurer une neutralité fiscale vis-à-vis du choix du mode d’habitat (sous forme de propriété individuelle ou coopérative).

Les obstacles liés à l’insuffisante coordination entre corpus normatifs

Le développement des coopératives d’habitants se heurte à des difficultés liées à une mauvaise articulation entre le droit coopératif et le droit du logement. Il conviendrait donc de mieux coordonner ces deux domaines normatifs.]]

Un premier problème concerne l’attribution des logements sociaux produits au sein de la coopérative par des bailleurs agréés : les procédures de droit commun (commission d’attribution par le bailleur, réservation de logements par les financeurs) pourraient entrer en conflit avec la procédure d’agrément des coopérateurs entrants par la coopérative (agrément utile pour garantir l’adhésion des habitants au projet collectif de coopérative). Il faut donc rechercher les voies d’une conciliation entre ces deux logiques en faisant en sorte d’associer la coopérative aux procédures d’attribution.

Une seconde difficulté concerne le développement des partenariats avec les sociétés HLM. Leur objet social ne leur permet pas toujours d’investir dans un projet d’habitat coopératif, quand bien même celui-ci prévoit qu’une part des logements produits est destinée au public cible des politiques d’accession sociale à la propriété. Dans la liste des structures dans lesquelles les organismes HLM ont la capacité à investir, il serait donc opportun d’ajouter les coopératives d’habitants. [1]

Enfin se pose la question du droit à l’aide pour le logement des habitants coopérateurs.

Un travail de proposition normative déjà avancé, qui pourrait aboutir rapidement

En juin 2011, les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés du Sénat ont déposé une proposition de loi visant à faire du logement une priorité nationale. Ce texte comporte, à son Titre V, un ensemble de dispositions. L’adoption de certaines permettrait de résoudre plusieurs des difficultés juridiques que rencontrent les coopératives d’habitants. Votre rapporteur recommande donc que le Parlement se penche sans tarder sur ces propositions.

La réflexion sur ces questions ayant naturellement progressé depuis la date du dépôt de cette proposition de loi, plusieurs amendements pourraient cependant lui être apportés. Parmi ceux-ci, on peut notamment évoquer les suivants :
 il serait formellement plus satisfaisant d’adopter un corps de dispositions spécifiques aux coopératives d’habitants (dans une loi sectorielle ou dans un chapitre spécifique du code de la construction et de l’habitation) que de modifier la loi de 1947. Celle-ci constitue en effet la loi-cadre de la coopération, dont les dispositions s’appliquent en l’absence de dispositions contraires contenues dans une loi particulière. Toutes les familles juridiques de coopératives ont d’ailleurs vu le jour dans des textes spécifiques ;
 il est plus pertinent de parler de « coopératives d’habitants » que de « coopératives de logement », comme le fait la proposition de loi, car ces coopératives ne fournissent pas seulement du logement, mais aussi des espaces communs. Elles sont par ailleurs le vecteur d’une redéfinition profonde des rapports de voisinage ;
 la proposition de loi donne un objet social trop étroit aux coopératives d’habitants, qui leur interdit d’offrir des activités de service à des non coopérateurs. Il faudrait les autoriser à délivrer ces services annexes de nature commerciale en prévoyant qu’ils fassent l’objet d’une comptabilité spéciale, qu’ils ne représentent pas plus d’un cinquième du chiffre d’affaires de la coopérative et que le bénéfice généré par cette activité soit soumis à l’impôt sur les sociétés dans des conditions normales ;
 la proposition de loi fixe également de manière trop étroite la liste des personnes susceptibles d’entrer au capital d’une coopérative d’habitants en tant qu’associés non coopérateurs. Elle oublie en effet de mentionner les personnes dont la vocation est de participer financièrement au capital de la société coopérative ;
 enfin, le texte omet de préciser qu’en cas de demande de sortie du statut de société coopérative, le Conseil supérieur de la coopération devrait donner un avis de conformité. A l’heure actuelle cet avis obligatoire n’est que consultatif. Compte tenu des plus-values latentes associées à des immeubles coopératifs, un encadrement rigoureux des sorties du système coopératif est nécessaire.

Notes

[1Dans le droit actuel, pour intégrer des ménages très modestes, la coopérative est obligée de recourir à un montage complexe. Elle cède un bail à construction à un bailleur pour qu’il produise des logements en Prêt locatif à usage social (PLUS) ou Prêt locatif aidé d’intégration (PLAI). Le bailleur finance intégralement les appartements concernés, Il paie à la coopérative la fraction de surface de plancher correspondant aux logements sociaux ainsi qu’une participation à la construction des espaces collectifs. Pendant la durée du bail, une co-propriété est constituée. Lorsqu’il s’achève, la propriété des logements revient à la coopérative. Le locataire peut quant à lui devenir coopérateur en acquérant au moins une part sociale.


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